Études de Marcel-Louis Baugniet

Marcel-Louis Baugniet (1896-1995) est l'un des plus grands artistes belges d'avant-garde. Les quatre études de meubles et objets domestiques acquises par le Fonds du Patrimoine de la Fondation Roi Baudouin témoignent de la diversité de son œuvre. Elles sont conservées au CIVA, musée et centre d'archives dédié à l'architecture du 19e au début du 21e siècle. Ces esquisses constituent un bel enrichissement de leur Fonds Baugniet.

Marcel-Louis Baugniet était un artiste belge aux multiples talents. Outre son activité de peintre, qu’il poursuivra pratiquement jusqu’à son centième anniversaire, il crée aussi des costumes de théâtre, des décors, des affiches, des tapisseries, des collages, des meubles... Il est surtout connu comme peintre constructiviste et champion de la « Plastique pure ». Cette abstraction géométrique, associée à un jeu de couleurs tout en élégance et en délicatesse, est caractéristique de son œuvre.

Baugniet quitte très tôt Liège pour Bruxelles. Il y fréquente l'Académie des Beaux-Arts aux côtés de Magritte et Delvaux. Il s'installe ensuite à Paris, où il est influencé par le cubisme de Léger et Zadkine, entre autres, et par l'architecte Le Corbusier. Il y découvre aussi l'art abstrait de Kandinsky, Mondrian et Delaunay, et c’est également là que naît sa fascination pour le constructivisme russe.

En 1922, Baugniet rentre en Belgique et épouse la danseuse d'avant-garde Akarova. Il crée pour elle des costumes et des décors de théâtre remplis de figures géométriques. Il contribue en outre à la revue moderniste bruxelloise 7 Arts. Celle-ci s’efforce de faire la synthèse de tous les arts et place la forme au-dessus du figuratif. Ce mouvement prendra le nom de « Plastique pure ». Dans les années 1920, Baugniet est particulièrement actif en tant qu'artiste d'avant-garde, sans toutefois jouir de la reconnaissance qu'il mérite. Peut-être était-il simplement en avance sur son temps.

Lorsque les avant-gardes se détournent peu à peu de l’abstraction, Baugniet se concentre sur les arts appliqués. En 1927, il fonde une boutique de décoration d'intérieur avec l'architecte néerlandais Ewaud Van Tonderen. L’esquisse « Projet de maquette » date de cette année-là. Nous voyons ici comment il traduit ses idées radicales et sa conception de la société dans ses meubles : la forme se met au service de la fonction. « Le beau, c'est l'utile ». Une philosophie que l’on retrouve également dans les autres esquisses, dont « Etudes de bar » et « Etudes de fauteuil ». Cette dernière esquisse constitue un bel exemple du mobilier tubulaire typique de l’artiste. Dans toutes ces études transparaissent les lignes pures et sobres de Baugniet.

Baugniet joue également un rôle important dans le domaine des matériaux. Il utilise ainsi de nouveaux matériaux tels que le métal chromé pour ses meubles tubulaires, le verre (illustré dans son « étude pour verres et carafes »), mais aussi le contreplaqué, le nylon, etc.

Cette variante « appliquée » fonctionne. Ses meubles connaissent un franc succès et sont présentés lors de nombreuses expositions internationales, dont l’Expo 58. A l’instar de ses célèbres meubles Standax, « mobilier social », qui peuvent être démontés et empilés. Après ses projets de meubles tubulaires suivent des meubles en bois à l’allure scandinave.

Les quatre esquisses acquises par la Fondation reflètent bien les différentes tendances de l’œuvre prolifique de Baugniet et permettent de documenter sa carrière professionnelle. Ces acquisitions sont conservées au CIVA. Ce musée, doublé d’un centre d'archives dédié à l'architecture du 19e au début du 21e siècle, abrite également le fonds Baugniet. Ces esquisses constituent dès lors une belle addition à ce fonds, seule collection d'une institution publique dédiée à cet artiste.

Baugniet a continué à créer des meubles et des objets décoratifs qu'il vendait avec succès dans sa boutique de Bruxelles jusque dans les années 70. Son talent de peintre ne fut cependant reconnu que dans les années 70, à la faveur de la redécouverte de l'avant-garde « oubliée » des années 1920. Sa vision engagée de l'art, du design et de la société en fait l’une des figures de proue de l'art d'avant-garde.

L’une des esquisse est déjà présentée à l’exposition « 7 ARTS : Avant-garde belge (1922-1928) » qui se tient au CIVA jusqu’au 9 août 2020. L’occasion de faire la connaissance des cinq fondateurs de 7 ARTS et de certains de leurs compagnons de route, dont Marcel-Louis Baugniet.