La buveuse d’absinthe

La buveuse d’absinthe est peinte par Léon Spilliaert en 1907, pendant la
période la plus créative de sa carrière, entre 1899 et 1912. Cette aquarelle
tire sa particularité de sa grande qualité, de son format muséal de 105 x 77
centimètres et de l’intérêt qu’elle présente pour l’histoire de l’art.

Revenu à Ostende, sa ville natale, en 1904, après un bref interlude à Paris,
Spilliaert réalise sa célèbre série de quinze autoportraits, où la solitude
et le conflit psychique sont rendus par un langage formel très personnel. La buveuse d’absinthe s’inscrit stylistiquement dans cette série. Contrairement à ses habitudes, Spilliaert peint la femme de face, vraisemblablement parce qu’il est interpelé par son état hallucinatoire.

Le résultat est un portrait mortifiant, montrant les conséquences destructrices
de l’addiction sur une jeune mondaine, une habituée de la vie nocturne ostendaise. L’oeuvre se distingue de la plupart des autoportraits par la stylisation extrême de la physionomie du visage. Seules subsistent les pupilles dilatées du modèle, noyées dans la noirceur des cavités oculaires.

Le cadrage inhabituel est une autre particularité. Le sujet occupe pratiquement
tout l’espace pictural, rendant impossible toute référence spatiale ou temporelle. La singularité de l’oeuvre se dégage également de l’harmonie poussée entre palette et technique. L’alternance typique de clarté et d’obscurité se combine avec de grands aplats de couleurs et des parties peintes et dessinées. C’est cette parfaite interaction entre couleur et technique et entre fond et forme qui donne à La buveuse d’absinthe son atmosphère intense et intemporelle.

Le Fonds du Patrimoine a acquis cette œuvre majeure lors d’une vente chez Sotheby’s à Paris et l'a mis en dépôt au Musée des Beaux-Arts de Gand.

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